Trouvé dans :
Notre Histoire. N° 142. (année 1997)
VODKA.
Contrairement aux idées reçues, le mot et la boisson qu'il qualifie ne sont pas très anciens en Russie.
Vodka est un diminutif de
voda, «eau», dérivé de la vieille racine indo-européenne qui a aussi donné
unda en latin,
hudôr en grec,
wadana en celtique,
water en anglais, etc. Le terme
vodka est attesté pour la première fois dans un texte de 1533, mais dans une acception purement médicale : «
préparer de la vodka, en enduire la plaie, puis la presser». Dans son sens usuel, on ne rencontre le mot qu'en 1666, dans un document où il est question d'un moine, Éphrem, auquel «
ses enfants apportaient en secret du vin et de la vodka» dans sa cellule !
La boisson, en tout cas, est plus ancienne que le mot : sous l'appellation de «vin russe» ou de «vin amer», elle est consommée dans l'empire des tsars dès la fin du 16e siècle. La première mention de «vin russe», en 1588, est également religieuse : le livre de comptes du monastère de Volokolamsk atteste que la communauté en fabriquait avec son propre grain.
La vodka est-elle une boisson indigène en Russie ? Rien n'est moins sûr. Certains historiens pencheraient plutôt pour une origine néerlandaise : les Hollandais, pour réduire leur fret, auraient exporté vers leurs escales russes, dès le début du 16e siècle, de l'alcool pur distillé chez eux, puis l'auraient dilué d'eau locale à l'usage des autochtones... Pendant les six siècles d'histoire nationale qui ont précédé la domination impériale de la vodka, les Russes ont surtout bu quatre boissons : la bière, l'hydromel, le vin et le
kvas (breuvage ordinaire des campagnes, à base de céréales fermen-tées, à peine alcoolisé).
La vigne, quant à elle, n'a été cultivée en Russie qu'à partir du 18e siècle, après la pacification de la région méridionale du Don. Mais le vin (
vino) était connu dès le 10e siècle, partout où se dressait une église et où se célébrait la liturgie eucharistique. Comme dans tout l'Orient orthodoxe, d'ailleurs, le vin de messe était traditionnellement rouge. Importé par les Génois de Crimée jusqu'à la fin du Moyen Age, il le fut par le port septentrional d'Arkhangelsk à partir du règne d'Ivan le Terrible, au milieu du 16e siècle. C'était le plus souvent du bourgogne romanée (rouge) ou du vin du Rhin (blanc).
À partir du 19e siècle, sans renoncer pour autant à la vodka, les Russes fortunés donneront leur préférence au bordeaux ou au Champagne. Et, pour l'usage liturgique, on utilisera surtout dans l'Église dépendant du patriarcat de Moscou le
kagor, vin doux qui n'a de notre cahors que le nom.
Nicolas ROSS
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NB : si la Voka est du vin russe, chez nous, en Bretagne, l'eau de vie se dit
gwin ardant.
C'est normal, de Brest à Brest-Litowsk, il n'y a qu'un pas.
Yec'hed mat d'an holl.
JCE